Carnet de route

Via Alpina 2016
Le 14/09/2016 par PRATESI Michel
5ème année – notre porte d’entrée cette année est Tirano en Italie ; nous avions quitté cette ville l’an dernier pour emprunter le Bernina Express qui nous ramenait chez nous – mais avant Tirano nous allons nous arrêter à Milan pour la soirée – ballade sur la piazza del Duomo, dans le quartier de la mode et sa galleria Vittorio Emanuele II, le parc du château Sforzesco …et arrêts obligés pour le Cappucino, la pizza xxl.. les gelati pour se mettre en appétit avant d’entreprendre notre longue itinérance de 11 jours en jouant encore à saute frontières entre Italie et Suisse.
Une autre soirée à Tirano qu’on atteint avec Trenitalia et ses voies ferrées habillement tracées au long du lac de Come ce qui nous ferait presque oublier pourquoi nous allons si loin pour randonner dans les Alpes… elles sont aussi chez nous ! mais la via alpina c’est le choix de traverser tous les pays alpins (8) et il nous reste du chemin….Cette année c’est encore le « pari » de parcourir près de 200 km gravir et « dégravir » 12000 m. il faudra se mettre en jambe et supporter notre charge (pas plus de 15% de son propre poids nous rappelle Monique ! )…
11 jours qui nous projetteront (au rythme de nos pas) vers d’autres cols, vers des vallées , certaines très secrètes ; nous feront faire des rencontres, des haltes, parfois gourmandes et si le parcours se fait essentiellement en Suisse, la proximité de l’Italie et de cette langue partagée nous fait à chaque moment douter de quel côté on se situe ; les Alpes, de l’Adriatique à la méditerranée sont l’espace commun. Les frontières sont marquées parfois pour la forme ; on les cherche au passage des cols, nous rêvons à ce que pouvait être l’usage de ces sentiers muletiers , d’échange et parfois de contrebande partagés. (certains sont historiques comme entre Chiarregio et Maloja et étaient déjà utilisés au 14ème siècle)
Pour nous, c’est marcher avec nos 12 à 14 kg sur l’épaule à peser chaque pas, à apprécier le vallon qui se dérobe sous nos pieds, à goûter de la tiédeur d’un arrêt à un lac, à se rafraîchir au torrent ou à la source naissante, à transpirer à l’attaque d’une nouvelle ascension, à souffler et parfois ramer dans l’attente du repos salvateur du refuge confortable qui nous attend ; 7 à 9 heures de marche c’est notre lot quotidien. Cette année beau temps à l’exception d’un après-midi où le temps de repas étant passé depuis longtemps, une chèvrerie nous donna refuge et le temps d’une collation l’occasion de goûter la production fermière.
Le soir trempés mais essorés, l’hôtel (il y en eu) de Maloja nous ouvrit « chaleureusement » son « trockenraum » pour parfaire notre séchage.
Je ne pourrai ici résumer notre « voyage » mais j’en retiens quelques passages – le temps d’un soir dans le camping du Prese (c’est déjà la Suisse) où la spécialité des Grisons du (Pizzoccheri del Valtellina) au nom plutôt sympathique nous laisse la mortelle impression de ne plus recommencer..à base de pates faites maison (camping) avec farine de Sarrazin , de choux vert ; de pommes de terres et de fromage fut roboratif. .. rêves de pizza ou de gelatti !
Mais aussi que d’accueils chaleureux à Tartaglione au-delà de Poschiavo après une journée longue ponctuée par un « bref » auto-stop , un accueil très féminin dans ce refuge sous le splendide Monte Disgrazia 3678 m ; mes amis me pardonneront ainsi ce petit écart sur le parcours « officiel ».
Plus tard ce fut l’étape vers Juf et le col de Lunghin, où nait l’Inn nous l’avons vue il y a 2 ans à Innsbruck plus au Nord Est ; et de ce col vers d’autres directions vers l’ouest, vers le sud s’écoulent les eaux de cette ligne de partage ; ces cours d’eau iront par de multiples détours alimenter les vallées de l’Italie, de la Suisse proche, se jeter très loin dans les mers intérieures, l’Adriatique….
Dans les rencontres ou des accueils des plus sympathiques je me rappellerai de celui d’Ulrike qui nous ouvrit son gîte à Avers Am Bach ; Ulrike et Norbert son d’origine allemande ; elle parte Français ; elle soupire en nous offrant des bières qui ne sont que Suisses ! elle nous a préparé un repas somptueux, salade confortable dont elle soigna la présentation avec quelques pensées… de pâtés en croûte faits maison, de pâtes, d’un dessert qui du attendre le petit-déjeuner du lendemain pour rendre l’âme. Ulrike avait pris soin de me demander lors de la réservation si nous n’étions pas végétariens.
Le lendemain nous étions au lac de Lei (nous sommes en Italie) ; qui nous offrit l’éclat de ses eaux turquoises et au fond la cime enneigée de la Stella un peu plus de 3000 m . La aussi mes amis devront excuser un autre écart mais le site n’en valait-il pas la peine ! . L’accueil de Valentino dans son refuge de l’Alp del Crot mériterait d’être plus confortable c’est son objectif, il est maçon de son état et se voudrait millionnaire .. après ces travaux ; mais il est en discussion avec les Suisses pour obtenir une alimentation électrique suffisante ; Les Suisses le lui doivent bien ; ce sont eux qui ont pris une enclave sur le sol italien pour construire le barrage et sont les producteurs. A côté, le frère de Valentino produit du fromage ; il est récompensé dans de nombreux salons ; en nous ouvrant les portes de ses caves il nous ouvre aussi l’appêtit.
A Isola (nous sommes toujours en Italie) l’offre commerciale était tellement alléchante qu’elle me faisait douter … ½ pensione + apéritivo + acqua + vino de la casa + caffé + grappa …. Et pourtant Martino est connu dans la région il nous reçoit dans son hôtel et la demeure de ses ancêtres depuis le début du 18ème siècle ; chaque soir il réunit tous ses clients dans sa demeure ; nous étions une vingtaine –apéritif petits fours et pendant qu’il raconte l’histoire de sa famille , des travaux dans cette belle maison, son personnel met en place un service à l’étage situé au dessus et où nous sommes reçus comme des invités … comme quoi il faut faire confiance aux annonces même en Italie.
Une de nos étapes marquante fut aussi notre arrivée à Selma ; la veille nous avions du requérir un taxi (offre spontanée) pour rejoindre notre hôtel à San Bernardino , et reprendre le matin un car postal pour démarrer notre 9ème étape - une belle étape qui devait être raccourcie par l’usage d’un nouveau transport en car postal (sinon l’étape était donnée pour 12 heures) . à Selma nous prenons une benne sans conducteur en libre service qui fonctionne parfaitement ; quelques hésitations mais qui nous fait économiser une ultime montée de 300 m. Sabrina gère l’osteria de Landarenco elle m’avait envoyé un sms pour m’annoncer que le restaurant qui devait nous servir le dîner et la « prima collazione » était fermé alors qu’il s’y était engagé ; elle prendrait le relais ; service familial sympa concocté par Aris le fils de Sabrina, la grand-mama et la tante …. apéritivo pour excuser le désagrément .
Nous arrivions déjà à l’avant dernière étape, Monique nous quitte pour rejoindre en bus Bellinzona y préférant cette villégiature à la dernière journée qui lui promettait 2000 m de descente ; les hommes seuls quittent le canton des Grisons pour passer dans celui du Tessin. Nous sommes toujours en Suisse Une belle et grande journée avec comme seule rencontre celle d’un chévrier et bien plus tard de 3 moutons ; pas une âme en 9 heures ; des lacs, des torrents des vallons insondables, des alpages désertés ; nous sommes en fin d’été ; une descente de 300 m dans des rochers instables et puis le plaisir de revoir la vie à la Capanna Alpe Cava ; un grand refuge où nous nous sentons bien, mais seuls ; Alice nous dit que la saison a été bonne et qu’elle sera là jusqu’en octobre. Un ami guitariste profite de leur solitude pour passer un peu de bon temps ; quelques notes et puis nous remontons dans ce grand dortoir. Le lendemain notre ultime journée nous descendons vers Biasca une longue descente sans difficultés cette fois dans un environnement boisé ; un cheminement sans rochers, sur une moquette d’épines…. Le rêve dans la randonnée. Biasca est une ville sans grand intérêt touristique mais nous permet de rejoindre par le rail très rapidement la Suisse de l’intérieur le lac des quatre cantons, Lucerne, Bâle et Dijon.
A l’année prochaine pour un prochain rendez-vous. Michel